Avec 7,5% de marge opérationnelle en 2023, le groupe Inetum est clairement en deçà des objectifs fixés par l’ambitieux plan Upscale 2025 (8%) et surtout de ceux, encore plus ambitieux, fixés par Bain Capital (9,2%). Et il est fort probable que l’année 2024 n’apporte pas le rattrapage escompté.
L’un des leviers retenu par notre actionnaire pour doper les indicateurs de rentabilité opérationnelle est la rationalisation du portefeuille, comprenez, l’arrêt des projets dont la marge est insuffisante. La mise en œuvre de ce stratagème se traduit immédiatement dans les faits par une explosion des licenciements relatifs aux restructurations réalisées dans l’entreprise.
Nous allons expliciter ce point de vue à partir d’un exemple concret. Prenons le cas d’un salarié dont le coût journalier est de 400€. Prenons l’hypothèse d’un actionnaire qui vise un objectif de marge brute de 35%. Dans des conditions normales de marché, le salarié doit donc être vendu au prix journalier de 540€ afin de répondre aux objectifs de l’actionnaire.
En cas de retournement de marché et de pression concurrentielle accrue sur les prix de vente, le salarié ne pourra plus être vendu au prix de 540€ par jour.
Soit l’employeur cherche à préserver ses marges à tout prix (et la valorisation de l’entreprise qui découle du niveau de marge) : Dans ce cas, l’employeur licencie le salarié. Outre la casse sociale occasionnée, inacceptable à nos yeux, cette solution n’est qu’un trompe-l’œil. L’entreprise perd son savoir-faire, perd la confiance de son personnel et sera dans l’incapacité de répondre aux besoins du marché lors de la reprise de l’activité. Or, nous pouvons constater, à l’aune des coûts de licenciement relatifs aux restructurations réalisés chez Inetum, que cette solution est celle mise en œuvre par la direction. En effet, les coûts de licenciement relatifs aux restructurations ont explosés ces dernières années au niveau des comptes sociaux d’Inetum SAS : 8,26 M€ en 2021, 8,71 en 2022 et 11,765 en 2023, soit une augmentation de 33% par rapport à 2022.
Soit l’employeur cherche à préserver l’emploi : Il s’agit de la solution défendue par la CFE-CGC, qui consiste à défendre le salarié et l’emploi avant de chercher à défendre les marges à tout prix. L’employeur renonce temporairement à préserver ses marges le temps de faire face au trou d’air sur le marché. Le salarié est alors vendu 400€ par jour, ne compromettant pas ainsi l’équilibre financier de l’entreprise. Les impacts positifs sont nombreux, depuis la fidélisation du collaborateur qui conserve son employabilité, jusqu’à la capacité de répondre aux demandes des clients dès lors que le marché retrouvera des couleurs.
Si la valorisation à court terme pouvait s’en trouver affectée, la valorisation à moyen terme et long terme s’en trouverait renforcée.
Et pour terminer, nous citerons François Hommeril, président de la CFE-CGC qui vient lui-même de subir un licenciement économique : « À 16 heures, l’usine est sauvée. À 16 h 30, je suis licencié. »
François Hommeril, en personne se retrouve victime de la folie démesurée d’une financiarisation à outrance du monde du travail.